Clystère « soi-même »

C’est un instrument qui se compose : d’un réservoir vertical, de type seringue, en métal. A une extrémité, il est fermé par un couvercle vissé dans lequel se loge un piston en bois tourné, à la poignée arrondie. A l’autre extrémité, ce réservoir est vissé sur un socle plat rectangulaire, arrondi aux deux bouts, fait de métal et de bois.  Sur ce socle court un tuyau, issu du réservoir, qui se termine par une canule, recourbée vers le haut, en forme d’obus effilé  et fixée sur un petit plateau arrondi.

L’ancêtre du clystère se retrouve dans l’Egypte antique sous la forme de la «poire à lavement» : une vessie fixée sur une tige creuse de roseau. Les fouilles de Pompéi ont aussi révélé de nombreux clystères en étain (appelés «strigillis») tout à fait fonctionnels. Par la suite, il semble disparaître en Occident au Haut Moyen-Âge et ne réapparaître timidement qu’aux XIIe-XIIIe siècles, sous le nom de «ceringue». Son usage est d’abord dévolu aux barbiers puis aux marchands d’épices qui deviendront les apothicaires, les seuls à pouvoir le faire au XVIIe siècle, un privilège royal. L’objet clystère devient ainsi le symbole de la profession, figurant sur d’innombrables blasons et enseignes de cette guilde. La trilogie « saignée, purge et clystère » résume les moyens essentiels dont on disposait pour traiter les maladies. Les constipations, voire les occlusions sont alors fréquentes chez les riches dont les régimes sont essentiellement carnés. Mais de nombreux «patients» ont certainement pris goût à la sensation que procure une tiède et bienfaisante montée (surtout s’il y a des opiacés dans le mélange). Il est du dernier chic de « se seringuer », de « se faire un petit clystère »  au minimum une fois par jour pour évacuer les humeurs et libérer le ventre. Louis XIII subira 200 clystères et 50 saignées en une année. Ninon de Lenclos (1620-1705) racontait qu’elle devait la conservation de son beau teint aux clystères. Le peuple voulant toujours imiter ses élites, aux XVIIe et XVIIIe siècles, en Occident, on aura tendance à se «purger» pour n’importe quel prétexte.

Matériaux - Techniques
Etain et bois
Fabricant / Période

ca XVIIIe siècle
Dimensions

H : 40 cm ; L : 30 cm ; D : 20 cm.

État
Mauvais, piston cassé, socle tordu
Destination

Le clystère est une seringue à lavements. Il permet d’injecter dans « le siège ou le fondement » des liquides laxatifs, à base d’eau salée ou de potions plus complexes pour différents traitements. Il servait donc à purger, soigner et, accessoirement, pouvait entraîner des états de conscience modifiés selon les substances employées.

Précision d'utilisation

Ce clystère « soi-même » permet de se faire un lavement sans l’intervention d’une tierce personne, en position assise. Il est conçu pour ceux qui ne veulent pas se montrer dénudés et notamment pour les femmes qui ne veulent pas prendre « un clystère » de la main d’un homme. Ces clystères étaient parfois inclus dans un coffre qui se transformait en tabouret sur lequel on pouvait s’asseoir. Le clystère était installé dans le couvercle, seuls le corps de la seringue et la canule en sortaient à chacune des extrémités. Napoléon Ier en possédait un. Peu courant avant le XVIIIe siècle, il l'est plus chez les bourgeois du XIXe siècle.

Date d'acquisition
08/03/2012
Origine des dons
Pr François Carré
Numéro d'inventaire
CPHR - 2012.482
Copyright
© Conservatoire du patrimoine hospitalier de Rennes